PRECISIONS SUR LE DEVOIR DE MISE EN GARDE DU PRETEUR
Publié le :
19/09/2022
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On peut définir le devoir de mise en garde qui pèse sur le banquier prêteur comme le devoir d’alerter l’emprunteur des risques générés par un crédit au regard des capacités de remboursement de l’emprunteur.
Il implique pour la banque de vérifier le niveau de connaissance de son client des caractéristiques du prêt proposé ainsi que ses capacités financières.
Ce devoir de mise en garde est une création de la cour de cassation qui, dans un but de protection des emprunteurs contre les risques découlant d’un prêt excédant leurs capacités de remboursement, a créé un cas de responsabilité spécifique du prêteur.
Le principe général est que le banquier est tenu d’examiner la situation financière de son client non averti et sa capacité, présente et à venir, à rembourser le crédit octroyé et d’attirer son attention sur les risques qui en découlent (notamment cour de cassation chambre mixte 29 juin 2007 n° 06-11.673).
La cour de cassation a rendu récemment des arrêts qui sont venus préciser le régime de ce devoir de mise en garde.
Par un premier arrêt du 1er juillet 2020 (n° 18-21.739), la chambre commerciale de la cour de cassation a cassé un arrêt d’appel qui avait débouté des époux d’une demande de condamnation d’une banque au paiement de dommages et intérêts pour ne pas les avoir mis en garde contre un risque de surendettement. La demande s’appuyait sur le fait que les trois prêts immobiliers octroyés étaient consentis sur une durée de 20 ans alors que le mari allait atteindre l’âge de la retraite au terme d’une période des huit années et donc subir alors une baisse de son revenu mensuel.
La cour d’appel avait débouté les époux emprunteurs au motif que leurs revenus annuels leur permettaient de faire face au remboursement des prêts jusqu’à la date de cessation de l’activité professionnelle du mari. La cour de cassation a pris en considération le fait qu’à la date de cette cessation d’activité, il resterait encore 12 annuités à rembourser, ce qui justifiait une mise en garde.
Par cet arrêt, la cour de cassation rappelle et précise que, pour l’appréciation de l’existence du devoir de mise en garde du banquier prêteur, sont à prendre en considération les revenus actuels des emprunteurs mais aussi leurs revenus futurs prévisibles.
Par un second arrêt rendu également le 1er juillet 2020 (n° 18-19.139), la chambre commerciale de la cour de cassation s’est prononcée sur l’existence du devoir de mise en garde concernant un prêt relais.
Le cas soumis à l’appréciation de la cour de cassation était celui de deux époux auxquels avait été consenti un prêt relais en sus d’un prêt déjà en cours pour le financement d’un projet immobilier.
Ce prêt relais était remboursable dans un délai de 24 mois et était destiné à permettre aux emprunteurs d’attendre la vente d’un bien immobilier dont ils étaient propriétaires et donc le prix de vente devait servir en partie à solder le concours temporaire correspondant.
Les emprunteurs s’étaient trouvés dans l’incapacité de rembourser ce prêt relais dans les 24 mois convenus et reprochaient à leur banque de ne pas avoir attiré leur attention sur le risque de surendettement né de son octroi.
La cour d’appel leur avait donné satisfaction en raison du « risque d’endettement résultant de la charge constituée par le remboursement du prêt relais ». Elle a retenu que le prêt relais, ajouté au prêt antérieur rendait l’ensemble excessif par rapport aux capacités financières du couple et que, à ce titre, pesait sur la banque un devoir de mise en garde « lors de l’octroi des deux prêts litigieux ».
La cour de cassation infirme l’arrêt de la cour d’appel au motif que « la vente du bien immobilier projetée par les emprunteurs devant permettre le remboursement du prêt relais, ce dernier ne pouvait constituer une charge permettant d’apprécier l’adaptation de l’autre prêt aux capacités financières des emprunteurs et au risque d’endettement en résultant ».
Cette solution nous semble devoir être approuvée dès lors que, par définition, un prêt relais se solde par affectation du prix attendu d’une vente immobilière. Il ne peut donc être considéré comme participant en soi au surendettement des emprunteurs. Les difficultés pour ces derniers ne peuvent venir que d’une difficulté ou d’une impossibilité à vendre le bien immobilier dans le délai fixé contractuellement, ce qui est fonction de paramètres postérieurs au prêt et qui ne peuvent donc être prévus par la banque à la date d’octroi du prêt relais.
Historique
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