DROIT D’ACCESSION ET BONNE FOI
Publié le :
15/12/2021
15
décembre
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12
2021
L’article 552 du code civil est le siège d’un mode particulier d’acquisition de la propriété : le droit d’accession.
Cet article dispose en son premier alinéa que « La propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous ».
Il en résulte que, par droit d’accession, toute construction implantée sur un sol appartient à son propriétaire.
Se pose néanmoins la question des droits d’un tiers ayant réalisé des constructions à ses frais et avec des matériaux lui appartenant.
C’est l’article 555 du code civil qui pose les règles applicables.
Cet article dispose :
« Lorsque les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers et avec des matériaux appartenant à ce dernier, le propriétaire du fonds a le droit, sous réserve des dispositions de l'alinéa 4, soit d'en conserver la propriété, soit d'obliger le tiers à les enlever.Si le propriétaire du fonds exige la suppression des constructions, plantations et ouvrages, elle est exécutée aux frais du tiers, sans aucune indemnité pour lui ; le tiers peut, en outre, être condamné à des dommages-intérêts pour le préjudice éventuellement subi par le propriétaire du fonds.
Si le propriétaire du fonds préfère conserver la propriété des constructions, plantations et ouvrages, il doit, à son choix, rembourser au tiers, soit une somme égale à celle dont le fonds a augmenté de valeur, soit le coût des matériaux et le prix de la main-d'oeuvre estimés à la date du remboursement, compte tenu de l'état dans lequel se trouvent lesdites constructions, plantations et ouvrages.
Si les plantations, constructions et ouvrages ont été faits par un tiers évincé qui n'aurait pas été condamné, en raison de sa bonne foi, à la restitution des fruits, le propriétaire ne pourra exiger la suppression desdits ouvrages, constructions et plantations, mais il aura le choix de rembourser au tiers l'une ou l'autre des sommes visées à l'alinéa précédent ».
On comprend à la lecture de cet article que la situation de ce tiers varie en fonction de sa bonne foi ou de son absence de bonne foi.
Dans le premier cas, le propriétaire ne peut pas exiger la suppression des constructions et doit rembourser au tiers certaines sommes définies par l’alinéa 3 du texte.
Dans le second cas, le propriétaire a droit soit d’en conserver la propriété avec remboursement de sommes aux tiers, soit d’obliger ce dernier à les enlever à ses frais.
La Cour de Cassation est venue préciser dans un arrêt récent (cour de cassation 3ème chambre civile 15 avril 2021 n° 20-13.649) quelles étaient les conditions d’existence de la bonne foi au sens de cet article 555 du code civil.
Dans le cas objet du pourvoi examiné par la Cour de Cassation, un homme avait construit une maison sur un terrain appartenant à sa fille. A son départ des lieux, il demande à sa fille le paiement des sommes prévues à l’alinéa 3 de l’article 555 du code civil, c’est à dire soit une somme correspondant à l’augmentation de valeur du fonds généré par les travaux, soit le coût des matériaux correspondants.
Cette demande est rejetée.
Par ailleurs, la destruction de l’ouvrage est ordonnée aux frais du père.
Ce qui revient à dire que sa bonne foi n’a pas été retenue.
Pourtant, la construction était intervenue avec l’autorisation du propriétaire, ce qui aurait pu amener la Cour de Cassation à retenir la bonne foi du constructeur.
Il avait en effet été antérieurement jugé (Cour de Cassation 3ème chambre civile 3 novembre 2016 n° 15-22.692) que « celui qui construit sur le terrain d’autrui avec l’autorisation du propriétaire est présumé de bonne foi ».
Par son arrêt de 2021, la Cour de Cassation ménage les droits du propriétaire en imposant une expression de volonté claire et expresse sur le sens de l’autorisation et ses conséquences.
La solution adoptée est présentée dans les termes qui suivent sur le site de la Cour de Cassation :
« La bonne foi au sens de l’article 555 du code civil s’entend par référence à l’article 550 du même code et concerne celui qui possède comme propriétaire en vertu d’un titre translatif de propriété dont il ignore les vices.
En conséquence, une cour d’appel, qui constate qu’un tiers a construit sur le terrain d’autrui avec l’autorisation du propriétaire mais sans titre translatif de propriété, en déduit exactement, sans être tenue de procéder à une recherche inopérante sur la renonciation du propriétaire à son droit d’exiger la démolition, que le tiers évincé n’a pas la qualité de constructeur de bonne foi et que la démolition requise de l’immeuble en cause doit être ordonnée ».
A défaut d’une expression de volonté sans ambiguïté du propriétaire sur le fait que l’autorisation de construction emporte renonciation pour lui à se prévaloir des dispositions de l’alinéa 1er de l’article 555 du code civil, la Cour de Cassation fait application de la définition de la bonne foi au sens du droit des biens, c’est à dire de l’article 550 du code civil qui dispose : « Le possesseur est de bonne foi quand il possède comme propriétaire, en vertu d’un titre translatif de propriété dont il ignore les vices. Il cesse d’être de bonne foi du moment où ces vices lui sont connus ».
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