OPPOSABILITE DE LA CESSION DE CREANCE
Publié le :
27/09/2021
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2021
Nous avons exposé dans des articles précédents le fait que, depuis 2016 et la réforme du droit des obligations, le régime de la cession de créance et de son opposabilité avait été libéralisé.
En effet, alors que l’ancien article 1690 du code civil subordonnait l’opposabilité d’une cession de créance au débiteur à sa signification (« le cessionnaire n’est saisi à l’égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur »), le nouvel article 1324 n’exige plus qu’une simple notification (« la cession n’est opposable au débiteur, s’il n’y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s’il en a pris acte »).
Rappelons que si la signification nécessite l’intervention d'un huissier, la notification peut se faire par simple courrier.
Un arrêt récent de la Cour d’Appel de DOUAI (chambre 8 section 3 16 septembre 2021 n° RG 21/00889) est venu opportunément rappeler et préciser que cette notification implique le respect d’un certain nombre de conditions pour rendre opposable au débiteur cédé une cession de créance détenue à son encontre.
En l’espèce, le débiteur, représenté par moi-même, avait interjeté appel d’un jugement du Juge de l’Exécution de Boulogne sur Mer ayant rejeté sa demande de nullité de commandements de payer qui lui avaient été signifiées par une société financière qui n’était pas son créancier originaire.
Cette société qui se prétendait cessionnaire de la créance avait fait signifier deux actes qui visaient deux créances distinctes et qui valaient à la fois signification de cession de créance et commandement de payer avant saisie-vente.
Le Juge de l’exécution de Boulogne sur Mer avait déclaré valides les commandements de payer avant saisie vente en retenant notamment qu’ils indiquaient clairement la référence des titres exécutoires ainsi que la mention de la cession de créance intervenue.
En appel, je faisais valoir, notamment, que l’opposabilité de la cession de créance et donc sa notification régulière au débiteur cédé devaient nécessairement intervenir préalablement à l’engagement d’une voie d’exécution.
Je rappelais les termes de l’article L 111-2 du code des procédures civiles d’exécution qui dispose que « Le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution » et en déduisait que l’engagement d’une voie d’exécution par un créancier invoquant une cession de créance à son bénéfice supposait que cette cession ait été rendue préalablement opposable au débiteur cédé et par conséquent que la notification soit intervenu préalablement à toute voie d’exécution.
La Cour d’Appel valide l’argument.
Elle affirme que dès lors que la cession de créance n’est pas opposable au débiteur tant qu’il n’en a pas été informé par notification ou qu’il n’en a pas pris acte, à moins qu’il ait consenti à la cession en y participant, l’acte de saisie fondé sur un titre exécutoire obtenu par le cédant ne peut être valablement délivré par le cessionnaire au débiteur cédé qu’en vertu d’une cession du titre exécutoire préalablement notifiée à ce dernier.
Elle ajoute que si l’acte de notification n’a pas à contenir les conditions de la cession, et notamment son prix, doit en revanche y figurer la substance de la convention, « afin de permettre au débiteur cédé de connaître non seulement le changement de créancier et le nom de ce dernier mais également les éléments lui permettant d’identifier et individualiser la créance cédée ».
Elle relève en l’espèce que l’acte de cession qui était joint aux commandements contestés ne mentionnait pas le nom du débiteur cédé et appelant ni un numéro qui aurait permis d’identifier les créances cédées.
Elle en déduit que la société intimée a engagé la procédure d’exécution forcée sans avoir au préalable signifié au débiteur la cession de créance.
Le jugement de première instance est donc infirmé et la nullité des commandements contestés ordonnée.
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