LA REMISE DE CONCLUSIONS VAUT SIGNIFICATION DE CREANCE
Publié le :
29/11/2023
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2023
Dans un arrêt du 1er juin 2022 (Première chambre civile n° 21-12.276), la Cour de cassation a jugé que la remise de conclusions comprenant copie de l’acte authentique de cession de créance valait signification au débiteur cédé et lui rendait donc opposable ladite cession.
L’affaire concernait un débiteur qui avait été condamné à payer le solde débiteur d’un compte détenu dans une banque. Celle-ci devait céder ultérieurement sa créance à une société.
Cette dernière a fait pratiquer des mesures d’exécution forcée à l’encontre du débiteur qui a saisi le juge de l’exécution compétent d’une demande de mainlevée.
La Cour d’appel saisie de ce litige avait constaté que la société cessionnaire avait remis au débiteur, lors d’une audience devant le juge de l’exécution, des conclusions comprenant copie de l’acte authentique de cession et en avait déduit que cette remise équivalait à une signification au débiteur auquel la cession était dès lors devenu opposable.
Cette Cour d’appel avait en conséquence débouté le débiteur de sa demande de mainlevée.
La Cour de cassation a approuvé ce raisonnement en rejetant le pourvoi formé par le débiteur saisi.
Cette décision nous apparaît surprenante et très critiquable.
En effet, si l’on peut admettre que la remise de conclusions auxquelles sont jointes un acte de cession de créance est susceptible de valoir signification de cession de créance et partant de rendre opposable cette cession au débiteur saisi, cette signification est nécessairement intervenue postérieurement à la voie d’exécution dont il est demandé mainlevée.
Or, l’article L 111-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que « Le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution ».
Il résulte de ce texte que le créancier qui engage une voie d’exécution doit disposer d’un titre exécutoire à la date où il l’engage.
Or, l’article 1324 du code civil dispose que « la cession n’est opposable au débiteur, s’il n’y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s’il en a pris acte ».
A notre sens, la combinaison de ces deux articles implique qu’un créancier qui a obtenu cette qualité en vertu d’une cession de créance ne peut engager valablement une voie d’exécution qu’après avoir rendu celle-ci opposable au débiteur cédé et donc après la lui avoir notifiée.
La Cour de cessation semble, par cet arrêt, permettre une signification ou notification postérieurement à l’engagement d’une voie d’exécution, ce qui suppose que la notification de cession de créance rende opposable cette cession au débiteur cédé avec effet rétroactif.
Cet effet rétroactif de la notification de cession de créance au débiteur cédé nous apparaît contraire à la lettre et à l’esprit de l’article 1324 du code civil qui subordonne l’opposabilité de la cession de créance à sa notification.
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