FONDEMENT DE LA FAUTE INEXCUSABLE DE L’EMPLOYEUR
Publié le :
08/09/2021
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Par trois arrêts récents (8 octobre 2020 n°18-25021 ; 18 mars 2021 n° 19-24284 ; 8 avril 2021 n° 20-11951), la 2ème chambre civile de la cour de cassation est venue apporter une précision sur le fondement de la faute inexcusable de l’employeur.
Elle indique que la faute inexcusable de l’employeur qui est caractérisée lorsque ce dernier « avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver » découle de l’existence d’un « manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé » du travailleur.
Cette référence au manquement à l’obligation légale de sécurité de l’employeur est une nouveauté et constitue une précision du fondement de ce mécanisme juridique particulier qu’est la faute inexcusable de l’employeur.
Rappelons que la loi du 9 avril 1898 a substitué à la responsabilité civile le principe d’une responsabilité sans faute mais forfaitaire du chef d’entreprise à l’égard du salarié victime d’un accident du travail.
En vertu de cette loi, le salarié victime d’un accident du travail bénéficie d’une présomption d’imputabilité et n’a pas à démontrer la faute de l’employeur pour obtenir réparation.
La contrepartie et donc l’inconvénient pour le salarié tient dans le caractère forfaitaire de la responsabilité de l’employeur et donc dans une limitation de cette responsabilité.
Cela étant, la victime salariée peut néanmoins prétendre à une indemnisation complémentaire lorsqu’elle rapporte la preuve d’une faute inexcusable de l’employeur (article L 452-1 du code de la sécurité sociale).
Par un arrêt « Veuve Villa » du 15 juillet 1941, la cour de cassation a défini la faute inexcusable comme une faute d’une exceptionnelle gravité, dérivant d’un acte ou d’une omission volontaire, en l’absence de tout fait justificatif.
Longtemps exceptionnelle, la reconnaissance de la faute inexcusable s’est banalisée avec des arrêts du 28 février 2002 par lesquels la chambre sociale de la cour de cassation a mis à la charge de l’employeur une obligation de sécurité de résultat et est venu précisé la définition de la faute inexcusable.
Depuis ces arrêts, il y a faute inexcusable quand « l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver »
Les trois récents arrêts rendus par la 2ème chambre civile de la cour de cassation ne sont pas venus modifier cette définition de la faute inexcusable mais sont venus préciser son fondement.
La cour de cassation précise que la faute inexcusable de l’employeur découle d’un « manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé ».
Ce faisant, elle pose le caractère légal de l’obligation de cette obligation de sécurité de l’employeur, alors qu’il avait été jugé (arrêts Amiante du 28 février 2002) que la faute inexcusable de l’employeur procède de la violation d’une obligation imposée « en vertu du contrat de travail le liant à son salarié ».
Par ailleurs, la cour de cassation ne fait pas référence à l’idée d’une obligation de résultat alors même que la jurisprudence antérieure avait pu affirmer de façon ponctuelle que la faute inexcusable de l’employeur trouvait son fondement dans une obligation de sécurité de résultat, notion pourtant intrinsèquement contraire à toute idée de faute.
Reste à savoir si ce changement de fondement de la faute inexcusable implique un changement de son régime.
Le principe en la matière est qu’il appartient à la victime d’apporter la preuve que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger et, d’autre part, que celui-ci n’avait pas pris les mesures nécessaires pour en préserver son salarié.
Cette conscience du danger est souvent déduite de la simple omission de prendre les mesures nécessaires pour protéger le travailleur du danger encouru (cour de cassation 2ème chambre civile 16 septembre 2003) ou du non-respect de la réglementation en matière de sécurité (cour de cassation 2ème chambre civile 12 mai 2003).
Sur ce point, l’arrêt du 8 avril 2021 a déduit la conscience du risque à partir de la seule constatation de la défectuosité d’un balcon à l’origine du dommage.
La cour assimile ainsi dommage et fait générateur, mais, il n’en reste pas moins que le principe selon lequel le salarié doit rapporter la preuve de la faute de l’employeur est maintenu.
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