Barème Macron : après la cour d’appel de Reims, la cour d’appel de paris permet d’en écarter l’application.
Publié le :
28/02/2020
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Après la Cour d’appel de Reims (CA Reims 25-09-2019, n°19/00003), la Cour d’appel de Paris vient de juger, dans un arrêt du 18 septembre 2019, que les juges peuvent ne pas appliquer le barème Macron dans certaines circonstances.
Rappelons que ce barème impose au juge qui doit se prononcer sur l’indemnité que l’employeur doit verser à un salarié licencié sans cause réelle et sérieuse de fixer cette indemnité en respectant un minimum et un maximum en fonction de l’effectif de l’entreprise employeur..
En l’espèce, la Cour devait se prononcer sur le licenciement d’un salarié qui ne disposait que d’un an d’ancienneté.
Pour une telle ancienneté, l’article L. 1235-3 du Code du travail prévoit que, si le licenciement survient sans cause réelle et sérieuse, le salarié peut obtenir une indemnité comprise entre :
- 15 jours de salaire bruts et 2 mois de salaire bruts si l’entreprise emploie moins de 11 salariés ;
- 1 mois de salaire brut et 2 mois de salaire bruts si l’entreprise emploie 11 salariés ou plus.
La Cour précise - et c’est important - que les articles 10 de la Convention n° 158 de l’OIT et 24 de la Charte sociale européenne révisée s’imposent aux juridictions françaises.
En d’autres termes, ces textes bénéficient d’un effet direct en droit interne.
Or, dans son avis n°15013 du 17 juillet 2019, commenté précédemment sur ce site, la Cour de cassation avait dénié, à l’article 24 de la Charte, tout effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.
Quant à l’article 10 de la Convention OIT, la Cour de cassation avait soutenu que le barème respectait cette disposition internationale.
Il sera rappelé que :
- L’article 10 de la Convention OIT prévoit que l’indemnité pour licenciement abusif doit être « adéquate » ;
- L’article 24 de la Charte reconnaît le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une « indemnité adéquate » ou à une autre réparation appropriée.
Implicitement, elle admet ainsi que dans certains cas l’application du barème pourrait être écartée dans des cas où la preuve serait rapportée que son application ne permettrait pas une indemnisation adéquate du préjudice subi par le salarié licencié abusivement.
Cet arrêt s’inscrit dans le sillage d’un arrêt rendu précédemment par la Cour d’appel de Reims qui, dans un arrêt commenté sur ce site, avait été explicite sur le sujet dans les motifs de sa décision :
L’article L. 1235-3 du Code du travail prévoit des plafonds d’indemnisation faibles pour les salariés de peu d’ancienneté. En outre, la progression des plafonds n’est pas linéaire. Il en résulte une potentielle inadéquation de l’indemnité plafonnée, voire une possible forme de différence de traitement en raison de l’ancienneté ;
Enserré entre un plancher et un plafond, le juge prud’homal ne dispose pas de toute la latitude pour individualiser le préjudice de perte d’emploi et sanctionner l’employeur ;
Il s’en déduit que le dispositif est de nature à affecter les conditions d’exercice des droits concernés par ces textes ;
En conclusion, les Cours d’appel de Reims et de Paris invitent à une appréciation au cas par cas (in concreto) et non à une appréciation abstraite ne prenant pas en compte la réalité (in abstracto).
Pour ces juridictions, il n'est donc pas exclu d'obtenir d'une juridiction nationale une déclaration d'inconventionnalité du barème Macron dans un cas particulier en cas de démonstration d'une atteinte disproportionnée au droit du salarié concerné à une indemnisation adéquate de son préjudice causé par un licenciement abusif.
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